– Au-delà de sa valeur symbolique, quelle signification attribuez-vous à
votre visite à l’Église de Chypre et à vos contacts avec son troupeau
spirituel ?
– Il existe une belle tradition dans l’Église orthodoxe, selon laquelle le
nouvel archevêque [d’une Église autocéphale], accompagné des
membres du Saint-Synode, rend visite aux autres Églises locales. Notre
visite à l’Église de Chypre n’est pas un acte protocolaire, mais un
pèlerinage dans notre patrie et une rencontre avec les âmes, non pas
seulement avec les clercs, mais avec le plérôme ecclésial. Nous sommes
allés donner de l’espoir et aussi pour en recevoir, comme il sied à
l’histoire de notre peuple.
– À votre avis, la crise que connaît la Grèce est-elle seulement économique,
ou bien existe-t-il une autre cause ? Comment l’Église peut-elle aider le
peuple grec, particulièrement en utilisant ses propriétés ?
– La crise que traverse notre pays est en premier lieu spirituelle et, par voie
de conséquence, morale. Nous avons perdu nos repères, nos valeurs, nos
principes. Il nous faut changer intérieurement, il faut changer notre vie,
notre conduite. Nous ne pouvons commander au FMI des valeurs et des
principes. Celles-ci s’obtiennent par la lutte [contre les passions]. Comme
le disaient nos Pères, il faut donner du sang pour recevoir l’Esprit. Tout le
reste n’est que rustines, car les difficultés passeront, comme ce fut le cas
dans le passé, mais les problèmes reviendront et seront encore plus
intenses.
Vous m’avez demandé aussi comment l’Église peut aider. Je me
demande cependant quand l’Église n’a pas aidé notre patrie ! Le but de
l’Église est éternel et eschatologique, et c’est d’être la source d’une vie
spirituelle élevée, de liberté et d’amour envers tous les hommes, de
fraternité et de paix, de négation de la haine, de la méchanceté, de
l’injustice. Elle soutient l’homme souffrant. L’Église d’Hellade, durant les
150 dernières années a mis à disposition 96% de ses propriétés pour les
besoins du peuple et il lui en resté 4%. À l’occasion de la crise actuelle,
elle s’est engagée pour utiliser ses biens, en prenant en considération,
d’une part, la couverture des dépenses liées à son fonctionnement et,
d’autre part, l’assistance aux hommes éprouvés, particulièrement des
catégories vulnérables.
L’archevêché d’Athènes et les diocèses métropolitains ont distribué en
2010 la somme de 96.234.000 Euros aux institutions de bienfaisance et
aux classes défavorisées. Quotidiennement, l’archevêché, par sa société
de bienfaisance « Apostoli » et par ses paroisses, distribue 10 000 rations
alimentaires aux gens qui vivent dans la pauvreté, tandis que chaque
mois, 1500 colis sont donnés aux familles grecques nécessiteuses. Dans
l’ensemble du pays, ce sont 150 000 rations alimentaires qui sont
distribuées par l’Église.
À cette occasion, je voudrais remercier du fond du coeur tous nos frères
chypriotes qui, par l’intermédiaire de l’Archevêché de Chypre, nous
assistent dans notre oeuvre. Nous leurs sommes reconnaissants.
– Dans le monde actuel, quelles doivent être les relations entre le peuple, la
religion, l’Église ; est-ce que les religions et l’Église s’identifient ?
– Les peuples, les religions, l’Église, ont pour centre l’homme et oeuvrent
pour lui. C’est là le point où ils doivent s’identifier.