.In Memoriam: Georges Haddad

mjoa Friday January 1, 2010 106
J’ai plusieurs fois commencé à écrire ce témoignage, mais je m’arrêtais, tant l’idée même du décès de Georges Haddad m’était pénible. Je n’aurais jamais imaginé qu’il parte avant moi, lui bien plus jeune, tant il était plein de joie et d’allant. Il m’est encore difficile de me convaincre qu’il soit parti si vite.
Quand il avait appris, il y a peu de mois, qu’il était atteint d’un mal pratiquement incurable, il s’est tout de suite soumis à la volonté de Dieu. Sa seule prière était que Dieu lui donne de garder le courage et la foi. Il demandait aussi que lui soient épargnées de grandes souffrances, non pas tant pour lui-même, mais pour la souffrance que cela causerait à ses proches. La dernière fois que je l’ai vu, deux jours avant sa dormition, il était conscient de la gravité de son état, mais s’en remettait en toute sérénité à la grâce de Dieu.

Georges faisait partie de ces personnes que je pouvais retrouver, après une longue absence, et reprendre notre conversation comme si l’on venait à peine de se quitter. Je ne parlerai pas de sa totale disponibilité, de son écoute aimante, de son attachement à l’Alba dans laquelle il était entré, jeune encore, comme on entre en sacerdoce, de son attention compatissante à chacun de ses étudiants dont il assumait personnellement les problèmes. Tout cela est très connu et sera certainement souligné par d’autres. Georges laissera un grand vide qui sera difficilement remplacé pour tous ceux avec qui il avait frayé, sa vie durant.
Lors de ses funérailles, en écoutant la récitation des Béatitudes, j’ai tout d’un coup réalisé qu’il les avait appliquées toutes. Il était véritablement ‘pauvre en esprit’, humble, ne se prenant jamais au sérieux. Il fut ‘doux’, refusant de se laisser aller à la colère, refusant la violence et la vengeance, même quand des coups de butoir lui furent assénés, avec rudesse, par ceux dont il se considérait très proche. Il fut durement touché, blessé en profondeur, mais il pardonna, car la haine n’a jamais eu de prise sur lui. Ce fut un ‘pacificateur’, un ‘cœur pur’. Il joua souvent le rôle de conciliateur entre ses amis, ses parents, ses étudiants . Il avait ‘faim et soif de justice’. Sa défense de l’Alba fut longue et proverbiale. Il était sûr de son bon droit et le défendait honnêtement, refusant de se prêter à des coups bas. Il fut ‘persécuté’ à cause de sa lutte acharnée ‘pour la justice’ de cette cause. Il était compatissant et ‘miséricordieux’, toujours prêt à aider, se faisant le défenseur et le père de ses étudiants. Pour tout cela, il faisait partie du Royaume de Dieu et trouvait sa consolation en Dieu.
Comme nous l’ont rappelé les hymnes de la Résurrection, chantées lors des funérailles, Georges n’est pas mort. Il est entré dans un surcroît de vie. Il vit maintenant la Résurrection. Il habite toujours le même Royaume, mais il lui est donné maintenant d’approcher encore plus la glorieuse face de Dieu. Il est donc devenu un intercesseur pour tous ceux qu’il a aimés. C’est lui qui prie pour nous. Ses prières se joignent aux nôtres dans le grand mystère de la communion des saints.
Toujours lors des funérailles, des fleurs en papier, tressées par l’affection de ses étudiants, furent distribuées par eux à chacun des participants qui remplissaient tous les recoins de la vaste église, comme lors des offices de la Semaine Sainte et de Pâques, comme si l’assistance pressentait que cette cérémonie était un avant-goût de la grande fête de la Résurrection. La vue de cette nombreuse assistance, des fleurs de toutes les couleurs en mains, a dû certainement plaire à Georges. Elle était un résumé de son œuvre: faire de la beauté à partir des éléments les plus communs. Depuis l’Incarnation, la matière est devenue capable de participer à l’ineffable. En faisant fructifier au centuple les dons de ses étudiants, en les aidant à s’épanouir, Georges participait à l’œuvre de Dieu. C’était son témoignage, sa façon de dire sa foi totale en Celui qui s’est abaissé pour nous ouvrir les voies de l’éternité, qui sont pavées de beauté et d’amour.
Ce n’est qu’un au-revoir, Georges. Tu resteras toujours parmi nous, en nous. Chaque fois que nous serons attristés, nous penserons à ton sourire. Tu étais beaucoup plus qu’un ami. Tu t’es voulu le frère d’un grand nombre, à l’image de Ton maître, Jésus. Et tu l’as été.
0 Shares
0 Shares
Tweet
Share